Depuis maintenant un peu plus d'un an, une association d'utilisateurs de logiciels libres fonctionne sur le pays basque, Euskalug. Les logiciels libres sont loin d'être seulement une histoire technologique, mais sont bien une aventure à sens philosophique, qui peut changer des aspects de notre société. Voici une discussion avec des membres de cette association.
Ortzadar : Linux, le logiciel libre, nous en avons tous plus ou moins entendu parler, pouvez-vous nous en dire plus.
Euskalug : Un logiciel libre est défini par 4 libertés fondamentales : Il peut être
librement :
utilisé
recopié et distribué
modifié, adapté ou amélioré
examiné dans son fonctionnement (on peut lire son code source).
On peut donc installer ou modifier en toute légalité un logiciel libre sur l'ordinateur d'un ami pour lui rendre service ce qui est formellement interdit avec un logiciel propriétaire comme MS-Word.
Linux est un système d'exploitation comme MS-windows, Mac OS, ou l'ancien DOS il est le fruit du travail collectif d'informaticiens reliés entre eux par l'internet. Son nom vient de celui de Linus Torwald, l'informaticien finlandais qui en a écrit la première version, et et du nom des systèmes Unix dont Linux reprend la structure très rationnelle. En fait pour des raison historiques et philosophiques on devrait dire "le système GNU/Linux"1.
Les logiciels libres sont fondamentalement le fruit d'un mouvement philosophique et moral qui veut favoriser la liberté des utilisateurs d'ordinateurs. Les principes de ce mouvement ont été formulés en 1984 par un chercheur étasunien Mr. Richard. M. Stallman2. Cette année là, il créa la Free Software Foundation et lança le projet de système libre GNU. Les buts3 de ce mouvement sont de favoriser la liberté des utilisateurs d'ordinateurs, et leur entraide.
En fait tout le monde est quelque part utilisateur d'ordinateur. Nous avons tous par exemple un dossier informatisé sur les ordinateurs de la sécurité sociale. Il s'agit en fait de favoriser, préserver même la liberté de l'information. Comme l'information, la culture, le savoir sont de plus en plus sur support numérique, cédérom, internet, etc..., le contrôle des outils informatiques, c'est à dire de « traitement automatisé de l'information », amène le contrôle de cette information. Le contrôle de l'information, est le véritable pouvoir.
Il s'agit finalement de préserver la Liberté politique tout cours.
L'entraide, le partage du savoir et l'assistance mutuelle sont aussi des valeurs fondamentales du mouvement des LL.
Ortzadar : Les logiciels libres sont-ils gratuits ?
Euskalug : Pour l'utilisateur lambda, qui peut les copier, les installer et les utiliser librement, les LL peuvent paraitre gratuits. c'est une de leurs dimensions sociales. Mais il faut savoir qu'il y a toujours un coût quelque part en temps ou en argent. Toutes les formes d'aide sont donc bienvenues, dons en argent, en temps de traduction, etc... Des milliers de bénévoles à travers le monde, des entreprises, des collectivités publiques participent à la production de LL.
On peut remarquer aussi que rien n'interdit de vendre du logiciel libre. Certaines sociétés4 en font leur métier comme par exemple la société française Mandriva (ex-mandraksoft), l'allemande Suse (rachetée par nowell), ou la canadienne Red Hat.
Ortzadar : Faut-il être qualifié en informatique pour utiliser ce type de logiciels ?
Euskalug : Pour les logiciels libres comme pour les logiciels propriétaires il existe des applications grand public, et des applications pour spécialistes. Les logiciels libres grand public ne sont pas plus difficiles à utiliser que leur équivalents propriétaires5 . Il demandent parfois simplement de savoir ce que l'on veut faire, ils ne réfléchissent pas à votre place, mais ensuite, ils paraissent souvent plus clairs d'usage. Par exemple, je trouve beaucoup plus facile de retrouver ses fichiers avec Linux, en utilisant konqueror6, qu'avec la dernière version de Explorer pour MS-Windows XP.
Ortzadar : Doit on être équipé d'un système Linux pour les utiliser ?
Euskalug : Non, pas nécessairement, il existe de nombreux logiciels libres très performants pour Windows ou MacOS, on peut se les procurer sur cédérom (projets OpenCD et Loliwin7). On peut aussi installer Linux et Windows sur le même ordinateur pour passer « en douceur » de l'un à l'autre. Il est aussi possible de tester GNU/Linux sans l'installer grâce à des systèmes sur cédéroms « vifs », autonomes, sans installation. On démarre l'ordinateur sur le cédérom qui contient un système complet, et on peut alors essayer celui-ci sans rien installer. Une fois l'ordinateur éteint et le cédérom retiré, on retrouve son ordinateur comme il était. Par exemple, il s'agit des cédéroms Knoppix8, Mandrakemove9, freeduc10, etc...
Ortzadar : Quelles sont les applications possibles, dans quels domaines existe t'il des LL ?
Euskalug : Il serait plus court de dire dans quels domaines ils n'existent pas! Pour citer les applications courantes, nous pouvons trouver des jeux, des outils bureautiques ( OpenOffice.org11
ou kOffice), des outils de dessins (Gimp12, sodipodi, etc..), pour écouter de la musique, en faire, voir des films, échanger du courrier électronique ou naviguer sur internet. le meilleur navigateur actuel
pour windows est libre (Mozilla-firefox13). De nombreux membres d'Euskalug, des milliers de personnes à travers le monde, n'utilisent que des logiciels libres.
Ortzadar : Le 7 mars dernier, la présidence du Conseil de l'Union Européenne adopte l’accord sur les brevets logiciels en dépit du règlement intérieur du Conseil, quels sont les enjeux ? Qu'est ce que ça va changer pour le monde du "Libre" ?
Euskalug : L'enjeu est fondamental, pour tout le monde. Car il s'agit pour des groupes influents de pouvoir breveter les idées, les concepts et donc de s'assurer le monopole de l'information et du savoir. Un logiciel est un bien immatériel, comme un théorème ou un poème. Il est régit par le droit d'auteur. si demain les grands groupes (microsoft, vivendi, etc..), grâce à du lobbying intense font aboutir cette procédure, ils pourront tout breveter : méthodes, procédés voire votre propre code génétique, et là ..c'est un aller simple pour le "Meilleur des Mondes"
Les brevets ne protègent que ceux qui ont les moyens de payer des experts et des avocats. La souveraineté européenne face aux États unis dans les domaines de l' informatique et de l'industrie est directement menacée. À court terme c'est la possibilité d'innover pour les PME qui est condamnée.
Ortzadar : Que propose l'association Euskalug, comment travaillez vous ?
Euskalug : Comme tous les LUGs14 nous aidons ceux qui le désirent à se procurer, installer utiliser des LL, parfois au cours des install party qui sont des rencontres organisées pour cela, ou en rencontrant les gens directement, ou sur internet. Nous avons 2 listes internet pour discuter entre nous par courrier électronique15, et nous profitons des listes techniques d'autres lugs Tout ceci avec les limites d'une action de bénévoles. Le mieux est d'aller sur le site de l'association :
http://www.euskalug.org/ ou d'envoyer un courriel à <contact@euskalug.org>
D'autres adresses internet :
Association bordelaise d'utilisateurs de logiciels libres :http://www.abul.org/
L'association paloise : http://www.paulla.asso.fr/
Association pour la Promotion et la Recherche en Informatique Libre : http://www.april.org/
Association Francophone des Utilisateurs de Linux et des Logiciels Libres : http://www.aful.org/
Un site francophone de documentation: http://www.framasoft.net/
Pour commander des cédéroms à prix économiques http://www.ikarios.com/
Un site d'entraide pour débutants, léa-linux ou « Linux Entre Amis » : http://lea-linux.org/
Revues pour débutants : GNU/linux Pratique (éditions Diamond) et Planète linux (DP presse).
Ces 2 revues sont des bimensuels acompagnés de cdroms contenant des systèmes, des logiciels, des images ou des fims, même des émissions de radio libres.
Radio libre sur les logiciels libres : divergence FM sur 93,9 Mhz (midi toulousain), ou sur internet au format libre ogg vorbis : http://divergence-fm.org/
2http://www.stallman.org/
5Logiciels propriétaires : non libres comme MS-Windows, Ms-office, Internet explorer, Photoshop, etc...
14Linux Users Groupe. Par extension, groupe d'utilisateurs de logiciels libres.
15Courriel. mot québequois officialisé par l'administration française.